jeudi 15 août 2013

Préparer son parage: l'équilibre du pied

Chose promise, chose due... Le voici, le voila: THE article tant attendu au sujet de l'équilibre du pied. 

Ca a été long à préparer tout ça... Mais je voulais vraiment faire un truc sympa. On trouve déjà pas beaucoup de sites en français qui expliquent un peu ce genre de truc et souvent c'est pas super clair ni très bien fait, avec peu d'images (oui je suis comme les enfants, il me faut des petits dessins pour ponctuer agréablement la lecture)... Bon si ça se trouve moi aussi ça va être pourri et j'aurai l'impression d'avoir fait quelque chose d'exceptionnel mais voila justement j'aurai l'impression d'avoir fait un truc exceptionnel donc je serai forcément contente de moi à la fin (il m'en faut peu ^^)...

Une petite note "juridique" pour toi, Lecteur qui trouverait ça tellement bien que tu aurais dans l'idée de me piquer mes images: tout est fait de mes petites mimines et avec des photos des pieds de ma jument. Je te remercie donc de ne pas réutiliser ces images sans mon accord :)

Sur ce *roulement de tambour* c'est parti!!!

Déjà, commençons par la base... Pourquoi doit-on parer régulièrement un cheval?
Le pied du cheval pousse de manière continue en moyenne d'1cm tous les mois. Dans la nature, le cheval use naturellement ses pieds car il parcourt plusieurs dizaines de kilomètres chaque jour pour répondre à ses besoins primaires (se nourrir et s'abreuver principalement), souvent sur des terrains abrasifs et/ou durs (rocailleux, caillouteux, sableux). Du coup, c'est topissime parce que ça va "travailler" le pied et lui donner une forme particulière adaptée au terrain sur lequel évolue le cheval. Un mustang américain parcourant des étendues rocailleuses n'aura pas les mêmes pieds qu'un cheval sauvage vivant dans le désert de Namibie (terrain sableux). L'environnement forge le pied du cheval. Le mustang aura un petit pied rond et compact avec une sole concave (=en forme de "bol renversé"), bien dur et solide lui permettant d'encaisser les chocs généré par un déplacement sur la rocaille. Un cheval de Namibie aura des pieds plats et larges presque "palmés", offrant une large surface portante et permettant un déplacement plus rapide et moins fatigant dans le sable parfois profond du désert. 
On le voit aussi chez notre cheval domestique: un cheval qui vit dans les vertes prairies normandes aura des pieds plus plats, avec des barres plus présentes (pour accrocher dans les terrains humides) qu'un cheval qui vit sur les terrains très secs du Vaucluse. Et les pieds de ce cheval-là seront encore très différents des pieds du cheval qui vit dans les montagnes Corses... A chaque terrain son type de pied. 
C'est ça qui est fascinant dans le pied du cheval... Cette capacité d'adaptation et de réaction à chaque stimulus. Pour peu que l'on sache l'entendre, le pied parle beaucoup. Il réagit à chaque changement (parage, alimentation, conditions de vie, traumatisme, maladie...) et nous guide dans le travail à réaliser avec notre cheval. Pour ma part, quand j'ai un doute sur un changement que j'ai fait, j'étudie toujours les pieds de a jument... On voit assez rapidement si on a bien fait de modifier l'alimentation, si le pré convient, s'il faut augmenter ou diminuer les rations... Faire du pieds nus, ce n'est pas seulement parer un pied. C'est une approche holistique (c'est à dire globale) de gestion du cheval. C'est voir le pied non pas comme un des éléments de gestion mais plutôt comme une finalité: un pied sera beau et performant si l'environnement (tout ce que nous offrons à notre cheval: parage, nourriture, conditions de vie...) est bon. 

Je t'entends d'ici me dire que si l'ami cheval est capable de s'auto-parer dans la nature pour s'adapter au sol sur lequel il évolue alors pourquoi devrait-on faire ce que la nature fait si bien toute seule?
En captivité, le pied du cheval peut difficilement s'user seul: les terrains sont souvent trop mous et le cheval ne parcourt pas assez de kilomètres pour ça et puis son alimentation est moins diversifiée et surtout, le plus souvent il doit fournir un travail incluant un cavalier sur le dos ou un attelage à tirer (dans tous les cas une "charge" supplémentaire) ce qui nécessite un pied le plus optimal possible, apte à gérer ces conditions de vie différentes. Voila un petit schéma pour mieux comprendre ce qu'il va se passer:
Ca, c'est un pied sain. Les phalanges (P1, P2 et P3) sont correctement alignées. La boite cornée (le sabot) suit la forme de P3. C'est très important car P3 est une phalange "suspendue" dans le sabot; elle est soutenue par les différents tissus et éléments du pied mais ne s'appuie sur aucune structure. La paroi (en brun) et la lamina (= tissus internes du pied ou chair feuilletée en rose foncé) sont solidaires comme le montre la jonction entre la paroi et la lamina (rose pâle) qui est de la même épaisseur partout. Les tissus sont donc tous bien compacts et assurent un bon maintient de P3.

Voyons maintenant ce qu'il se passe si on laisse la nature "parer" notre pied:
Les flèches représentent les différentes forces exercées sur le pied. En bleu, ce sont les forces qu'on va appeler "inévitables": c'est la pression exercée par le sol (flèche du bas) et la pression induite par la pousse de la corne (flèche le long du sabot). Sous l'effet de ces pressions inévitables, si on ne fait pas de parage, on va voir apparaître un premier phénomène qui sera un décollement de la paroi (flèche rouge qui part de la paroi) ce qui va avoir pour effet de distendre les tissus à la jonction paroi/lamina. Ces tissus étant étirés, P3 n'est plus soutenue correctement. Petit à petit, les talons vont devenir fuyants c'est à dire se "replier" sous le pied. Les différentes structures du pied vont progressivement avoir du mal à jouer leur rôle de soutien. On aura alors une descente de P3 dans la boîte cornée (flèche rouge vers le bas). P3 va venir appuyer sur la sole, créant ainsi une pression sur celle-ci. A terme, si on laisse ceci se poursuivre, on verra le pied rentrer dans un circuit de fourbure avec une bascule de P3. D'où l'importance d'un parage régulier et correct.

Néanmoins, le pied du cheval sait ce qu'il lui faut. Notre rôle de pareur va donc être seulement de l'aider dans ce sens. D'ailleurs, on voit bien dans le cas de certaines maladies comme le pied va réagir positivement dès qu'on va apporter au cheval ce qu'il faut pour aller dans le bon sens. Par exemple quand j'ai eu droit à la grosse pourriture de fourchette, dès que j'ai commencé à remettre le pied à plat en descendant les talons et en dégageant bien le pied au niveau de la sole et de la fourchette, comme par hasard le pied est allé mieux en quelques semaines... et à l'arrivée de la bonne herbe rebelote! guérison du pied... 
Donc nous finalement on va essayer d'apporter ce dont le pied a besoin tout en essayant de lui donner une forme équilibrée qui permettra au cheval de gérer son "activité" de travail... C'est pourquoi l'étude de l'équilibre des pieds est important lorsque l'on pare...

C'est bien mignon tout ça mais... comment savoir si notre pied est équilibré? C'est simple: on va "marquer" notre pied à l'aide de repères:

On commence par tracer les trois axes principaux:
- l'axe longitudinal (A) qui passe par le milieu de la lacune centrale de la fourchette et son apex;
- l'axe transversal (B) qui passe par le point le plus large du pied et coupe l'axe A à 90°;
- l'axe C qui coupe A à 90° en passant par le milieu de la distance qu'il y a entre l'apex de la fourchette (2) et le point de jonction de la ligne blanche et la paroi (4), cela nous donne la zone de pince (D);
- les deux axes coupant l'axe C à 90° et passant le "seat of corne" c'est à dire la zone de sole se trouvant juste devant les talons.

Ensuite on place des repères sur la fourchette:
- le milieu de la fourchette sur l'axe A (1);
- le point de croisement entre l'axe A et la ligne des talons (b);
- l'axe correspondant à la ligne des glomes (a);
- l'axe passant par le "seat of corne".
- la délimitation de la fourchette en traçant deux lignes reliant les bords de la fourchette à son apex;
- l'angle des barres en reliant le "seat of corne" à l'apex de la fourchette, les barres devant normalement se terminer à hauteur du milieu de la fourchette.

"Découper" le pied de cette façon permet de mieux voir où se situent les asymétries et ainsi de voir quelles sont les structures à travailler pour aider le pied à se rééquilibrer en travaillant dans le bon sens.

Dans l'article suivant, je vous propose de découvrir des exemples commentés des pieds de ma jument. 

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